Emanuil A. Vidinski | Mi Casa, Sofia

Photo : Alain Barbero | Texte : Emanuil A. Vidinski | Traduction du texte bulgare : Raya Hristova, interview et bio (de l’allemand) :  Sylvie Barbero-Vibet

 

L’autre jour, j’ai vu ma main vieillir
c’était en automne, un dimanche, le soleil brillait
j’ai vu ces petits signes précurseurs du  silence
les fines ridules sur la peau, comme des nouveaux-nés
qui réclament leur droit de vivre
avec une volonté inébranlable de grandir
et de s’approfondir
dans leur zèle

J’ai vu ma main vieillir
et j’ai eu de la peine,
si touchante dans sa vulnérabilité
et calme
afin d’endurer docilement tout
ce dont elle ne sait rien

 

Original (bulgare)

Онзи ден видях ръката си да остарява
беше есен, неделя, слънцето грееше
видях тези малолетни предвестници на тишината
фините бръчици по кожата, като новородени
да заявяват правото си на живот
с непоколебимата воля да растат
и задълбават
в усърдието си

Видях ръката си да остарява
и ми дожаля
такава една трогателно безпомощна
и тиха
да понася безропотно всичко
за което не знае

 

Interview de l’auteur

Que peut faire la littérature ?
Emanuil A. Vidinski : La littérature peut presque tout. Arrêter le temps, donner du sens, apprendre l’empathie, offrir une issue, transmettre du savoir, apporter du réconfort et, last but not least, guérir les blessures qui ne saignent pas mais qui sont douloureuses.

Que représentent les cafés pour toi ?
EAV : Un beau café peut être comme un chez-soi. Peu d’endroits ont cette capacité. C’est pourquoi j’apprécie beaucoup les bons cafés. Il faut qu’il soit calme et qu’il y ait beaucoup de fenêtres.

Où te sens-tu chez toi ?
EAV : Dans certains cafés et dans les bibliothèques. Dans une pièce remplie de livres, j’ai toujours l’impression de ne pas être perdu. C’est le sentiment familier que l’on a chez soi. Là où il y a des livres, on a l’impression qu’il n’y a pas de coins, et même si on trébuche et qu’on tombe, on se relève en douceur.

 

BIO

Né en 1978, Emanuil A. VIDINSKI est un écrivain, poète, éditeur et musicien bulgare. Il a notamment écrit les recueils de nouvelles Kartografii na biagstvoto (Cartographies de la fuite, 2005) et Egon i tishinata (Egon et le silence, 2015), ainsi que le roman Mesta za dishane (Lieux de respiration, 2008). En tant que musicien, Vidinski était chanteur et guitariste du groupe Par Avion Band qu’il a lui-même fondé. Le recueil de poésie bulgare-allemand Par Avion a été traduit en allemand par Petya Lund et publié par les éditions eta à Berlin (2017).