Archive d’étiquettes pour : Leipzig

Bibliothèque Nationale Allemande de Leipzig

« Melange der Poesie »

Dans le cadre de l’exposition
« JETZT & ALLES. Österreichische Literatur.Die letzten 50 Jahre »
26 avril 2023 — 7 janvier 2024

© Fotos : Julia Rinck

 

Sibylla Vričić Hausmann | Café Grundmann, Leipzig

Photo : Alain Barbero | Texte :  Sibylla Vričić Hausmann | Trad. : Sylvie Barbero-Vibet

 

Je reste un corps étranger. Être servie déclenche en moi un sentiment de culpabilité. S’asseoir seule dans un café, un sentiment d’imposture. Peut-être parce que je viens d’un village et qu’adolescente, je traînais plutôt dans la forêt et à l’arrêt de bus. Enfant, les cafés ou les chocolats chauds, les gâteaux et les glaces servaient d’appâts pour me persuader de faire des randonnées ou d’autres activités sportives. Une fois, mon frère s’est cassé le bras en faisant du ski. Je n’en revenais pas que nous quittions les pistes sans avoir eu mon “chocolat chaud”. Pourtant, enfiler et enlever ma combinaison de ski, marcher dans mes chaussures de ski et traîner mes skis, prendre le téléski, dévaler les pentes à toute vitesse et affronter le froid mordant étaient pour moi les pires épreuves ! Il y a quelque temps, j’étais ici, au Café Grundmann, avec ma mère et mon beau-père, qui est mort l’année dernière. En général, mon beau-père se faisait bien dans les cafés. J’imagine qu’il se sentait chez lui dans cette atmosphère semi-publique, car ses parents possédaient une épicerie dans laquelle il passait beaucoup de temps étant enfant. Le Grundmann convenait particulièrement bien à mon beau-père. Parce qu’il est élégant, un peu démodé, parce qu’il y a un piano et que – d’après les affiches – on y donne des concerts de jazz. La séance photo a été longue et m’a bien sûr beaucoup exposée aux autres clients et personnes qui travaillent ici. Je ne sais pas, cher Alain, comment tu as fait pour que je m’y sente à l’aise.

 


Interview de l’auteure

Que signifie la littérature pour toi ?
Sibylla Vričić Hausmann : Un lieu où je ne suis pas seule – mais où je peux être pour moi. Donc peut-être ce que sont les cafés pour d’autres.

Quelle est l’importance des cafés pour toi ?
SVH : Je les fréquente plutôt rarement. Mais parfois, ils sont des lieux de récompense, de loisir, de moments particuliers. Un jour d’été, s’asseoir avec mes enfants à une petite table ronde de café, manger une glace et faire crisser mon pied dans le gravier…

Pourquoi as-tu choisi le Café Grundmann ?
SVH : Il ressemble à un café viennois – des lieux de culture littéraire que je n’ai pas connus moi-même, mais que je trouve intéressants et attrayants. Peut-être, oui peut-être, qu’un peu de leur charme me sera transmis et qu’un jour je réapprendrai à écrire et à lire dans un café.

Que fais-tu quand tu n’es pas au café ?
SVH : Je me fais du café. J’écris mon livre et des poèmes. Journal intime. Des rapports d’expertise. Envoyer des e-mails. Je passe des entretiens d’embauche. Suivre l’actualité et échanger avec des amies. Joue avec mes enfants. Prend soin de nous. Lave la vaisselle. Écoute la radio. Surfe sur le web. Va voir un psychologue. Dors, dors, dors, dors. Rêve de choses et d’autres. Je me prépare pour les phases plus extraverties de l’année.

 

BIO

Sibylla Vričić Hausmann, née en 1979 à Wolfsburg. Études à Münster (WWU) et Berlin (FU), puis projets à Berlin, stage au Goethe-Institut de Sarajevo ; a vécu de 2009 à 2012 à Mostar, en Bosnie-Herzégovine, où elle a travaillé dans un théâtre. 2014-2017 : études à l’Institut littéraire allemand de Leipzig. Parallèlement à sa propre écriture, elle est professeur d’écriture littéraire, lectrice et modératrice lors d’événements littéraires. Cofondatrice du blog Other Writers Need to Concentrate (en collaboration avec Katharina Bendixen et David Blum en 2020) et de la série de lectures Zürn (en collaboration avec Özlem Özgül Dündar en 2022). Vričić Hausmann a notamment reçu le prix Orphil pour ses débuts en 2018 (pour son recueil de poésie 3 FALTER, poetenladen Verlag), une bourse de séjour du Literarisches Colloquium Berlin en 2019 et la bourse Rainer Malkowski en 2022. En mars 2023, son recueil de poèmes actuel meine Faust (kookbooks Verlag) sera élu Lyrik-Empfehlung 2023. Elle vit à Leipzig avec ses deux enfants.

Blog Café Entropy, Barbara Rieger, Alain Barbero, Linn Penelope Micklitz, Café Kater, Leipzig

Marcus Klugmann | Café Das Kapital, Leipzig

Photo : Alain Barbero | Texte : Marcus Klugmann | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet

 

Comme les parents de ma petite amie de l’époque préféraient les cafés au mobilier et à la musique uniformes, je me suis senti un peu comme un hôte (qui fait payer ses clients à la fin). Même si je n’étais pas du genre à faire la conversation, j’ai tout de même essayé de briser la glace. J’ai donc raconté que ces derniers temps, je m’asseyais tous les jours à cette table du fond, que j’y écrivais et lisais, je décrivais à quel point c’était joli à la lueur de la bougie, quand elle vacille un peu sur la page devant soi, dans quelle bulle confortable on se trouve protégé par le hâlo de lumière, à l’abri de tous les maux passés, présents et futurs du monde et des autres convives, tout en étant nourri par le placenta cotonneux et prometteur de leurs murmures …
Je me suis peut-être un peu emporté, excusez-moi, ce n’était certainement pas la formulation exacte. Mais j’ai conclu mon petit exposé de la manière suivante : parfois, je m’imagine être Peter Altenberg à Vienne, il y a cent ans. C’était un écrivain qui vivait quasiment au café. Aujourd’hui encore, il y est assis sous forme de statue à sa place habituelle. Peut-être qu’ils mettront aussi un jour une statue de moi ici, penché sur mes manuscrits, à la table du coin. Héhé.
On ne devrait pas essayer de briser la glace sur laquelle on doit encore évoluer toute une soirée. De toute façon, j’ai toujours eu l’impression que les parents de mon amie de l’époque souhaitaient un homme plus pragmatique que moi pour leur fille. C’est d’autant plus incompréhensible que j’ai cru avec la phrase suivante, regagner le rivage plus modeste et donc prétendument plus sûr : Eh bien, il n’a pas gagné grand chose avec son art, il devait sans arrêt se faire payer son Einspänner (c’est un espresso avec de la crème fouettée – très populaire dans les cafés viennois). (En fait, j’ai appris, en retravaillant ce texte, qu’il n’y avait pas de statue à la table d’Altenberg. Seulement une poupée de cire, juste à l’entrée, tout sauf flatteuse).

 


Interview de l’auteur

Que signifie la littérature pour toi ?
Marcus Klugmann : Heureusement et malheureusement, à peu près tout. Pas une seconde dans la journée où je ne pense pas à elle.
Heureusement, parce que pendant longtemps, je n’ai pas su ce que je voulais faire de ma vie, parce que j’ai toujours regretté de ne pas être passionné par quelque chose et que j’ai toujours admiré ceux qui ont une passion.
Et puis malheureusement, parce que je ne veux et ne peux plus rien faire d’autre, je ne sers à rien/ne suis pas utile à grand chose, je le dis sans coquetterie, et c’est assez handicapant au quotidien (je corrige : très, pas assez). Je veux dire : je pourrais, maintenant que nous avons un jardin, m’intéresser à la culture et à l’entretien des plantes ou au moins vouloir réparer la petite maisonnette qui se trouve là, dans le jardin ouvrier. Mais j’ai du mal.
Exception faite de mes enfants et de ma femme, qui sont toujours présents en moi et autour de moi, et qui doivent le rester pour toujours, qu’il en soit ainsi.

Quelle importance ont les cafés pour toi ?
MK: Avant, beaucoup, maintenant peu ou aucune. Avant, je pouvais y rester longtemps seul, être en même temps parmi les gens, mais sans risque d’être abordé. Au fond, dès le début, je trouvais cela un peu gênant d’écrire dans un café, environ cent ans en retard pour la fête, ridicule. Regardez, un homme de lettres ! Mais c’est justement ce qui m’a forcé à vraiment écrire. Si je n’écrivais pas aujourd’hui, je serais irrémédiablement gêné. À la maison, j’étais trop distrait par Internet et le calme, la fatigue, le lit qui m’attire. Depuis le Covid, c’est-à-dire la fermeture des cafés, puis des heures d’ouverture réduites, je me suis habitué à m’asseoir à la table de la salle à manger, enfin, presque, presque (Internet est toujours trop important : PROCRASTINATION !). Et puis, pour des raisons financières.

Pourquoi as-tu choisi le Café Das Kapital ?
MK : La musique n’y est pas agaçante, les serveurs ne me sont pas antipathiques, je n’ai pas besoin de commander sans cesse quelque chose… et puis je voulais montrer le café où j’étais régulièrement, où j’ai aussi écrit la majeure partie de mon roman qui, je l’espère, sera bientôt publié. Il est aussi photogénique, le café Kapital.

Que fais-tu quand tu n’es pas au café ?
MK : Écrire, relire, amener les enfants à la crèche et les chercher, manger, boire, changer les couches, lire, regarder Youtube, faire des lectures, caresser le chat – ce genre de choses.

 

BIO

Né en 1981 à Halle, Markus Klugmann a fait des études de langue et de littérature allemandes à Halle, puis à l’Institut de littérature allemand (DLL) de Leipzig. Il s’est marié et a deux enfants, toujours indépendant en tant que lecteur et écrivain. Son premier livre va bientôt être publié.

 

 

Blog Entropy, Barbara Rieger, Alain Barbero, Isabella Feimer, Café Cinema, Berlin

Linn Penelope Micklitz | Café Kater, Leipzig

Photo : Alain Barbero | Texte : Linn Penelope Micklitz, Extrait du livre Abraum, schilfern | Trad. : Sylvie Barbero-Vibet

 

1740 : Sidonia von Hedwig Zäunemann vient de se réveiller et a déjà le sentiment de se trouver hors de son corps, comme si ce dernier n’avait plus rien à voir avec elle. Une fatigue, s’apparentant au deuil, s’accumule derrière son visage, de sorte que sa peau se bombe, se soulève et s’éloigne d’elle. Elle n’arrive à rien, seul l’acte d’écrire lui semble réconfortant. Elle erre le long de la table et saisit le papier à lettres.
Il est vrai que le simple fait de dire ou d’écrire ce sentiment de “ne pas pouvoir ressentir” le rend supportable. Il glisse pour ainsi dire des épaules vers le ventre, ce qui n’est certes pas plus agréable, bien au contraire, mais permet de moins s’affaisser et de limiter au visage le décollement de la peau.
Sidonia taille son crayon. À la vue des copeaux, elle manque de perdre brièvement son sang-froid. Que faire de ces restes ? Il lui semble que ces questions et bien d’autres, qui sont souvent venues la posséder ces derniers mois, ne viennent pas d’elle. Peu importe la manière dont elle considère les choses, elle ne trouve rien, rien qui l’émeuve, rien qui la touche. À l’exception des copeaux du crayon, qui la travaillent, sans qu’elle en comprenne la raison.

 


Interview de l’auteure

Que signifie la littérature pour toi ?
Linn Penelope Micklitz : Le travail, la simplicité, la vivacité.

Quelle signification les cafés ont-ils pour toi ?
LPM : Passer du temps seule avec des gens, manger sans devoir débarrasser après.

Pourquoi as-tu choisi le Café Kater ?
LPM : J’y ai toujours aimé la décoration, la nourriture et le café. Il y a un an, j’ai emménagé tout près et j’essaie maintenant d’y passer à l’occasion du temps.

Que fais-tu lorsque tu n’es pas au café ?
LPM : Je fais mon propre café

 

BIO

Née en 1992 dans la forêt de Thuringe, Linn Penelope Micklitz a étudié la philosophie et l’écriture littéraire à l’Institut littéraire allemand. Elle travaille comme critique littéraire et auteure à Leipzig.

Blog Entropy, Barbara Rieger, Alain Barbero, Elisabeth R. Hager, Fräulein Wild, Berlin

Katharina Bendixen | Museumscafé Goetz, Leipzig

Photo : Alain Barbero | Texte : Katharina Bendixen | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet 

 

Café de rue

Autrefois, quand je ne voulais pas manger le rôti ou les légumes, mes parents transportaient notre table à manger dans la rue. C’était une grande table, en bois massif, avec une rallonge supplémentaire pour l’agrandir. Ensemble, mes parents portaient la table jusqu’en bas, tandis que je suivais avec mon assiette remplie et une chaise. Telle une serveuse, ma mère mettait la nappe sur le bois. Je devais prendre place et mes parents disparaissaient à l’étage dans l’appartement. Par les fenêtres ouvertes, j’entendais alors la voix du présentateur du journal télévisé, puis la douce musique du film. De temps en temps, ma mère ou mon père passait la tête par la fenêtre au-dessus de moi. Je serrais alors un peu plus fort la cuillère, mais ne mangeais toujours pas.
Parfois, des chiens passaient et, s’il faisait assez sombre, je leur lançais des croûtes de pain ou de la couenne de lard. Une chance. Mais le plus grand bonheur, c’était quand un autre enfant de la rue avait reçu la même punition que moi. Souvent, son assiette était remplie d’un plat que j’appréciais, et il en était de même avec mon repas. Avec un peu d’habileté, nous parvenions à échanger nos assiettes à travers la rue. Ces soirs-là, aucun de nous deux ne devait aller se coucher le ventre vide.

 


Interview de l’auteure

Que signifie la littérature pour toi ?
Katharina Bendixen : Beaucoup de choses – en quelques mots, peut-être un fort sentiment de communion que je ressens dans les moments de lecture ou (plus rarement) d’écriture.

Que signifient les cafés pour toi ?
KB :  Des lieux de rencontre où je peux également ressentir un lien fort avec la bonne personne au bon moment.

Pourquoi as-tu choisi le Museumscafé Goetz ?
KB : Parce qu’à Leipzig, c’est l’un des très rares lieux publics où la présence d’enfants ne fait pas lever les yeux au ciel. Parce qu’il se trouve à la distance parfaite de notre appartement pour un tour de vélo le dimanche après-midi. Parce qu’il y a des livres pour enfants, des jouets et plein de jeux. Parce que le café, les gâteaux et les biscuits sont délicieux. Et parce que personne ne trouve problématique que le jus de fruit se renverse.

Que fais-tu lorsque tu n’es pas au café ?
KB : Écrire, lire. Cuisiner, faire du pain, des gâteaux. Écouter des podcasts. Déposer les enfants quelque part ou aller les chercher. Aller en vélo avec les enfants jusqu’au lac et espérer qu’ils jouent à deux dans l’eau peu profonde quelques minutes et sans se disputer. Si ça ne marche pas (c’est-à-dire presque toujours), m’asseoir dans l’eau et jouer avec eux jusqu’à ce qu’on n’en puisse plus de rire.

 

BIO

Née en 1981 à Leipzig, Katharina Bendixen écrit des livres pour enfants (Loewe), adolescents (Mixtvision) et adultes (poetenladen). Ses textes ont reçu de nombreux prix et bourses, notamment le prix Kranichsteiner Literaturförderpreis (2014), la bourse Heinrich-Heine-Stipendium (2017) et une bourse de travail du Deutscher Literaturfonds (2020/21). Son dernier roman pour la jeunesse, Taras Augen (2022), a reçu le prix Lesekompass de la Foire du livre de Leipzig et le Klima-Buchtipp de l’Académie allemande de littérature pour l’enfance et la jeunesse. Sur le blog Other Writers Need to Concentrate (www.other-writers.de) elle s’engage pour une meilleure conciliation de l’écriture et du travail du care et pour une activité littéraire favorable aux familles. Elle est membre du conseil d’administration du Sächsischer Literaturrat e.V. et membre du PEN-Zentrum Deutschland.

 

Blog Entropy, Barbara Rieger, Alain Barbero, Sabine Gruber, Café Engländer, Wien

Kaśka Bryla | Obenauf Kaffeemanufaktur, Leipzig

Photo : Alain Barbero | Texte : Kaśka Bryla, extrait de Die Eistaucher (Parution en mars 2022, Éd. Residenz) | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet

 

C’était un vieux café éclairé par des lustres de cristal et des petites lampes de table. Pendant la journée, la lumière du soleil pénétrait par trois baies vitrées. Des photographies en noir et blanc d’écrivaines et de compositrices célèbres étaient accrochées aux murs, et Iga avait même découvert un jour la photo d’une chef d’orchestre. Des murs blanc crème, des canapés vert pastel et un sol en parquet créaient une atmosphère qui se prêtait aussi bien aux repas d’affaires et rencontres qu’à la lecture de journaux et de livres. C’était l’activité principale d’Iga lorsqu’elle passait ses matinées ici. Les serveuses et les serveurs la connaissaient et la laissaient occuper pendant des heures, avec un petit expresso, l’une des tables très appréciée pour quatre personnes près de la fenêtre, table sur laquelle elle étalait des livres de mathématiques et des carnets de notes pour inscrire de temps en temps un calcul, mais la plupart du temps, elle regardait par la fenêtre. Personne ne lui a jamais demandé si elle ne devait pas être à l’école ou en apprentissage.

 


Interview de l’auteure

Que signifie la littérature pour toi ?
Kaśka Bryla: La connaissance, le plaisir, la retraite, le débat, tout.

Quelle importance les cafés ont-ils pour toi ?
KB: Les cafés sont pour moi des lieux d’échange et de solitude. Ils m’accompagnent depuis que j’ai 13 ans. Peu importe où je vivais.

Pourquoi as-tu choisi le Obenauf Kaffeemanufaktur ?
KB: Parce que c’est un café récent où l’on essaie des nouveautés. Tout comme Leipzig est pour moi une ville où il se passe toujours quelque chose d’inhabituel. Parce que l’espace y est donné.

Que fais-tu lorsque tu n’es pas au café ?
KB: Rien d’autre. Échanger ou être seule.

 

BIO

Née à Vienne, Kaśka Bryla a grandi entre Vienne et Varsovie. Elle a suivi des études d’économie politique dans la capitale autrichienne, puis a prolongé sa formation à l’Institut littéraire allemand de Leipzig où elle a co-fondé en 2015 la revue littéraire et le réseau d’auteur(e)s « PS – Politisch Schreiben ». Elle est encore membre aujourd’hui du comité de rédaction.
Elle a reçu la bourse START en 2013 et le prix Exil en 2018. En 2020, elle a publié son premier roman Roter Affe. En 2021, sa pièce de théâtre Das Verkommene Land est jouée pour la première fois à Leipzig. En mars 2022, son deuxième roman Die Eistaucher sera publié aux éditions Residenz.

Blog Entropy, Barbara Rieger, Alain Barbero, Aron Boks, Spitzenback, Café, Berlin, Kreuzberg

Linda Achberger | Café Puschkin, Leipzig

Photo : Alain Barbero | Texte : Linda Achberger | Traduction : Georg Renöckl

 

shorebird

ici ça sent le sel, les petites bêtes à carapaces rouges, et les coquillages collés aux rochers comme s’ils voulaient se retenir à quelque chose. sur les falaises des oiseaux déposent des œufs, petits et gris. Je retiens le jour, comme s’il allait se briser, je le retiens doucement comme des truites humides sur l’étal du marché, ouïes tremblantes, bouches ouvertes. le soir, tu prends un couteau et découpes les petits yeux des poissons, tu me les présentes la main ouverte. ils scintillent.

 


Interview de l’auteure

Que signifie la littérature pour toi ?
Linda Achberger : Pour moi, la littérature, c’est l’écriture. Et l’écriture, ce n’est rien qu’un échec. Une tentative, une chute, constante, permanente. Une pelote que j’essaie de démêler, fil par fil, image par image, mot par mot. La littérature n’est qu’une approche de la réalité – ou du moins de ce que nous prenons pour la réalité. La littérature, c’est donc toujours aussi un mensonge. Un petit mensonge, à l’aide duquel j’essaie de me rapprocher de la réalité.

Quelle importance les cafés ont-ils pour toi ?
LA : Pour moi, une partie essentielle de la narration, c’est l’observation. J’aime être assise, muette, à observer. Ce sont des moments, des images furtives, des expressions sur des visages, qui s’inscrivent en moi, en permanence. Les cafés m’offrent cette possibilité – un lieu dans lequel je peux rester muette, à observer.

Pourquoi as-tu choisi le café Puschkin ?
LA : C’est l’atmosphère du café Puschkin qui me fascine. Elle est chaude & sombre et il y résonne une nostalgie qui raconte le temps passé et des souvenirs. En outre le café Puschkin est le premier café où je suis allée à Leipzig. Je me rappelle encore qu’il faisait froid et que j’ai perdu un de mes manchons. Il était en laine rouge foncé.

Que fais-tu lorsque tu n’es pas au café ?
LA : Je me balade dans la forêt alluviale, en collectionnant des graines, des glands et des morceaux de bois, que je n’utilise que rarement pour bricoler quelque chose.

 

BIO

Née en 1992 à Bregenz (Autriche), Linda Achberger a étudié l’allemand et la géographie à Innsbruck. Elle a obtenu son master en littérature allemande à l’université de Leipzig. Depuis 2015 elle poursuit ses études au « Deutsches Literaturinstitut Leipzig ». Elle publie des textes dans des magazines et des anthologies, dernièrement dans Prosser/Szalazy (Éd.) : wo warn wir ? ach ja : Junge österreichische Gegenwartslyrik (2019). En 2018 elle a obtenu la bourse « Startstipendium für Literatur » de la chancellerie fédérale d’Autriche.