Mieze Medusa & Markus Köhle | Cafe C.I. – Club International, Vienne

Photo : Alain Barbero | Texte : Mieze Medusa & Markus Köhle | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet  

 

Un thé tête-à-tête au C. I. entre Mieze Medusa et moi

Jamais de thé. Du thé jamais. Café, bière, eau. Même des toasts du C. I., des frites et un feuilleté aux épinards. Mais jamais de thé. Du thé jamais. C’est précisément un léger moment de thé qui entre dans l’histoire. Et même plus encore, il s’est transformé en photo. Köhle avec du thé. Cela restera à jamais associé. Köhle avec du thé au C. I. Est-il malade ? Köhle en thé tête-à-tête avec Mieze Medusa. Qu’est-ce que ça veut dire ? Le pouvoir des images est grand, celui des mots ne l’est pas moins. La nuit des bières est longue, le temps du thé est-il en train d’advenir ou bien est-il déjà terminé ? En cours d’infusion ou déjà trop infusé ? Cela ne regarde que nous.

Qu’est-ce qu’il a à parler du thé ? Il l’a pourtant commandé lui-même !

Nous n’aimons pas les symboles de statut social. Nous n’aimons pas les maisons individuelles avec jardin, clôture et abri pour voiture. Nous préférons la piscine couverte à la piscine privée. Louer des appareils plutôt que de les avoir tous entassés dans notre cave, aller à la bibliothèque plutôt qu’avoir des étagères débordantes de livres… 
Stop ! Ceci n’est pas vrai. 
Nous vivons exprès dans un immeuble ancien pour que les étagères remplies de livres aient de la place jusqu’au plafond. Mais quand elles menacent de nous tomber dessus, nous allons au café. Seul, à deux ou avec d’autres. Probablement avec plus d’un livre et au moins un carnet de notes dans la poche. On garde le silence. 
Je lis, il écrit. 
Il réfléchit, je prends des notes. 
Il y en a toujours un qui a un manuscrit sur lui… Mais où est donc le feutre rouge ?
La ville, c’est aussi un luxe ! On n’est pas obligé de payer un loyer pour chaque pièce dont on a besoin. Enveloppés par le bavardage ambiant, nous apprécions la solitude dans un environnement de pensées, de conversations et de boissons. 
Personnellement, j’aime le thé. Depuis toujours. Il a fallu quelques décennies à Markus pour en arriver là. Mais c’est vrai : au C.I., nous ne buvons vraiment du thé que lorsque c’est nécessaire. Quand nous voulons passer l’automne en bonne santé. Pour que cela marche, répondre positivement à la question : « Et on peut en vivre ? »

 


Interview des auteurs

Que peut la littérature ?
Markus Köhle : découper, souder, mastiquer.
Mieze Medusa : Cela dépend de ce que l’on attend d’elle.

Quelle est l’importance des cafés pour toi/vous ?
MK : Selon le moment ou le lieu, selon que j’aie besoin de ceci ou cela, elle est grande comme un immeuble ou petite comme un trou de souris.
MM : Aller boire un verre seule, en tant que femme : parfois encore un acte de rébellion aux yeux des gens qui regardent avec un air bête. Jusqu’à la fin de ma vie, je ne me laisserai pas priver de cette liberté.

Où te sens-tu toi / Où vous sentez-vous chez vous ?
MK : Là où je peux enlever mes chaussures.
MM : Là où je mets quelques livres sur l’étagère et où je pose mon ordinateur portable. Et c’est encore plus facile si c’est au milieu d’une grande ville.

 

BIO

Markus Köhle écrit pour être entendu : www.autohr.at
Il est écrivain, artisan littéraire, technicien linguistique et le père du slam en Autriche. Il écrit pour les jeunes et les moins jeunes, fait de la littérature « sérieuse » et de « divertissement », organise et anime des slams de poésie et le festival de prose d’Innsbruck depuis plus de 20 ans, gère le projet d’auteurs Retrogranden aufgefrischt dans les murs de l’Alte Schmiede à Vienne et est rédacteur de la revue littéraire DUM (www.dum.at). Dernièrement, il a publié : Das Dorf ist wie das Internet, es vergisst nichts (roman, Sonderzahl 2023).

Mieze Medusa est auteure, rappeuse et pionnière de la scène autrichienne du poetry slam. Elle se produit sur les scènes internationales depuis 2002 et a repris son nom de MC pour sa littérature de prose. Son premier roman Freischnorcheln est paru en 2008. Depuis, elle a publié de la prose, mais aussi des recueils de textes de slam et des enregistrements sonores du duo hip-hop mieze medusa & tenderboy, et bien d’autres choses encore. Elle organise et anime des poetry slams en Autriche, en tant que slameuse active, elle ne voyage pas seulement en Allemagne et en Suisse, ses performances de spoken word l’ont déjà menée jusqu’à Shanghai.
Derniers ouvrages : Was über Frauen geredet wird (roman, Editions Residenz, 2022) et Die Krise schrieb man nicht mit langem “i”, auch wenn sie riesengroß ist (textes de slam en collaboration avec Yasmin Hafedh, Editions Lektora, 2023).
www.miezemedusa.com