Erika Kronabitter | Café Dommayer, Vienne

Photo : Alain Barbero | Texte : Erika Kronabitter | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet

 

à cette même table
toujours à la même place
son visage tourné vers l’extérieur
son regard vers l’intérieur
les marques au fil des ans
plus profondes sur la peau
comme sillons sur la terre

Katherina | Liebling, Vienne

Photo : Alain Barbero | Texte : Barbara Rieger | Traduction Sylvie : Barbero-Vibet

Attirante, pas facile, assise dans la lumière elle fixe ton côté obscur. Elle ne te regarde pas et devine tes intentions avec la sagesse d’un vieil homme. Comme la plupart, tu ne souhaites pas juste une amoureuse, mais quelque chose qui n’est sûrement pas sans danger. Pourtant une chose est sûre : avec elle, il est possible de souffrir avant de mourir.

 

Hubert Weinheimer | Zum Roten Bären, Vienne

Photo : Alain Barbero  | Texte : Hubert Weinheimer tiré de sa chanson “Kronprinz” du groupe “Das Trojanische Pferd” | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet

 

Et tant que je ne sais pas – ce qui brise les planches
je suis et je reste – un bateau vascillant
Je salue et implore – ne remercie pas
Good night folks & good luck !

Sabina Auckenthaler | Café Weimar, Vienne

Photo : Alain Barbero | Texte : Sabina Auckenthaler | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet

 

À la vue des morceaux brisés, elle se demanda que faire de ces débris. Y avait-il quelque part en elle assez de place pour garder de tels déchets ? Ou serait-il préférable de tout jeter sans compromis ?
Au fond, pensa-t-elle, sa relation n’était qu’un grand malentendu : elle était tombée amoureuse de lui parce qu’elle prenait ses expressions maladroites pour des jeux de mots, il était envouté par sa couleur de cheveux chatoyante, en réalité factice.
“Ce n’est pas vrai qu’on apprend de ses erreurs” déclara-t-elle. Pour la troisième fois consécutive, elle était tombée sur le mauvais numéro, comme depuis des années elle achetait des souliers trop grands, que ses pieds trop fins perdaient immanquablement.

Astrid | Café Prückel, Vienne

Photo : Alain Barbero | Texte : Barbara Rieger | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet

 

Est-ce un lieu où nous vivons, respirons, aimons, une maison où les émotions reposent, se plient, brisent la vitre sur laquelle nous dansons, rions, jouons, où se trouve la pièce vers laquelle nous n’allons pas et la raison pour laquelle nous nous résignons, étrangers, faux et souriants, avec acharnement, tremblant, rampant entre les gens, qui manifestent, crient, se révoltent, pleurent et les malades qui nous embrassent avec leurs mots et nous obligent à rester, en un lieu où depuis toujours nous vivons, jouons, lisons, dans une maison où nous combattons nos sentiments, derrière la vitre qui nous permet à peine de voir dehors, où nous dansons, embrassons, respirons, crions, nous révoltons, pleurons, est-ce ça que nous voulons nous voir servir, est-ce une maison que nous méritons ?

Simon | Café Goldegg, Vienne

Photo : Alain Barbero | Texte : Barbara Rieger | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet

 

assis
lit
danse
en silence

part
mène
repose
en prose

tu vas
sans
réflexion
loin

-toi-
sans
traduction
reste

Rosi | Café Engländer, Vienne

Photo : Alain Barbero | Texte : Barbara Rieger | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet

 

Si proche si douce
Comme la vraie médecine
Moins efficace
Que le café au lait
Si loin si dure
Comme les possibilités
Ici de la rouge patrie

Rica | Café Eiles, Vienne

Photo : Alain Barbero | Texte : Barbara Rieger | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet

 

Entre les tons ne reste entretemps plus de temps pour pleurer, entre lui et elle seulement treize ans, entre elle et moi presque un monde qu’ensemble nous pleurons, non loin de l’université. Entre les demi-tons restent les sentiments, entre la Carinthie et les Caraïbes le monde, entre tables, chaises et couloirs vides ne demeure aucun espace pour rêver, alors que non loin sévit une tempête. Entre la Carinthie et Berlin se situe Vienne, et au milieu du café non loin de l’université ne se trouve personne avec un sac où subsiste parmi clés, pièces et papiers une bonne part de plaisir. Rien ne dépasse de Vienne en fourrure, mais une tempête sévit, non loin le vent souffle sur le monde et au milieu de salles froides et vides, il nous donne le sentiment que nous sommes – presque – en sécurité.

Khaled | Café Europa, Vienne

Photo : Alain Barbero | Texte : Barbara Rieger | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet

 

Sur ce continent
La valise nous transforme
En zombie
Chacun est Dieu
De la moitié du monde
Où génie et folie
Se confondent
Sortent du cadre
Dans toute notre vie
Contre nourriture et cigarettes
L’inspiration nous apporte
Clarté et oubli

Reinhard | Kleines Café, Vienne

Photo : Alain Barbero | Texte : Barbara Rieger | Traduction : Sylvie Barbero-Vibet

 

A la vue de ta photo, l’intemporalité comme oubliée, s’ouvre une bouteille presque d’elle même. Tu portes les habits de guerre dans le musée du monde et tu ne viens pas seul pour boire un verre avec nous et chasser le cours de l’histoire. Sous la méfiance des hommes au travail, à travers mille occasions, avec un premier, un deuxième, puis un troisième et d’autres encore. Toute cette expérience accumulée, pourtant ton regard nous ramène des années en arrière.